mardi 31 juillet 2012

Les niveaux logiques en équi-coaching





Après cette constatation  que le vivant se traite dans son ensemble à l'inverse d'une voiture que l'on répare au garage, j'ai continué à tenter de satisfaire mon envie obstinée de comprendre Lancelot. 
Ce bel indiférent m'a emmenée sur les chemins de l'équitation dite éthologique*. J'ai assisté à une démonstration de Andy Booth, un instructeur de la méthode dite Parelli. Ce qu'il faisait avec son cheval et les chevaux des autres me semblait tout bonnement magique. Je me suis alors dit que si j'avais ce problème de communication avec Lancelot, sans doute que d'autre que moi avait aussi ce problème avec leurs chevaux. 
En faisant une formation d'instructeur modulaire en équitation éthologique au Haras de la Cense, j'allais pouvoir l'aider, pouvoir m'aider et - accessoirement - pouvoir aider d'autres personnes.
Comme je vous l'expliquais dans l'article intitulé "La Communication" j'avais déjà appris à déplacer des morceaux de mon cheval ce qui avait ouvert une brèche dans notre relation. Je faisais plus attention à ses opinions. Pour ma plus grande difficulté! Lancelot faisait montre de résistance que je comprenais mal...

Il m'a fallu un moment pour comprendre que je faisais moi-même de la résistance et qu'il avait sans doute raison de me mettre sur cette voie de réflexion.

Lancelot est un de mes meilleurs chevaux qui soit pour tester le leadership des managers qui viennent nous voir. Evelyne rencontre ce souci de vouloir emmener le cheval sur un parcours qu'elle a créé. Elle est face à un Lancelot qui la regarde d'un oeil distant qu'elle se décide à lui montrer ce qu'elle veut. Et elle lui parle, lui explique, le supplie... sans effet!
Abordons les niveaux logiques.
De quoi s'agit-il? Ce sont six niveaux superposés nous offrant une représentation de notre conscience. Chaque niveau individuel influence les niveaux qui suivent. Cela permet de pouvoir émettre une hypothèse sur l'origine du blocage.

Voici les différents niveaux tel que définis par Robert Dilts :

1. La Mission :
Pour l'individu : au-delà de l'identité ce à quoi il est relié
Pour l'entreprise : disons que l'individu s'identifie à la mission de l'entreprise

2. L'identité :
Pour l'individu : il s'agit ici de son identité profonde, ce qui donne sens à la vie
Pour l'entreprise : cela sera sa mission, le sens, la stratégie

3. Les valeurs et croyances :
Pour l'individu : la façon dont il se perçoit et ce qu'il croit du monde
Pour l'entreprise : il s'agit des valeurs et de la culture de l'entreprise

4. Capacités :
Pour l'individu : ses ressources, son savoir-faire, ses capacités
Pour l'entreprise : compétences

5. Comportement :
Pour l'individu : ses réactions, ce qu'il exprime
Pour l'entreprise : actions, décisions

6. Environnement :
Pour l'individu : son environnement, ses collègues et les liens qu'il a avec eux
Pour l'entreprise : concurrence, marché

Quel était le problème d'Evelyne?

Evelyne vient d’être nommée manager d’une équipe et pense ne pas avoir de charisme. Elle vient pour régler ce problème "une fois pour toute", car il est récurrent dans son parcours de vie.
Cette croyance va influencer les différents niveaux logiques qui suivent :

- elle n’a pas appris à donner des instructions et devient agressive (Capacités)

- elle est hésitante, parle d’une voix saccadée, elle questionne du regard constamment (Comportement)

- très vite l'équipe va comprendre qu’elle n'est pas sûre d'elle et moins directive, les horaires de travail s'en ressentent (Environnement)

Vous comprenez maintenant l'effet courroie de transmission que provoque une croyance dans l'entreprise. Les niveaux logiques vont nous permettre de voir comment les croyances peuvent être limitantes ou ressources de nos capacités.

Les niveaux logiques dans l'entreprise
En entreprise un manager qui connaît les niveaux logiques pourra efficacement avancer en manoeuvrant sur les comportements de son équipe sans toucher à leur identité. C'est toute la différence entre "tu es nul" (identité) et "il me semble qu'il y a une erreur dans ce dossier dont tu as la charge"(comportement)!

S'attaquer à l'identité mènera à un manque de confiance dans la relation, à de l'irrespect, de la colère et de l'incompréhension. Mentionner un comportement permet un échange.

Rester dans le factuel est la meilleure façon d'agir car nos conclusions sont issues de nos présupposés sur les motivations du collègue ou de l'équipe de travail.

Quand nous utilisons les paroles pour exprimer nos sentiments, nous opérons une falsification et une distortion car nous passons d'un système spontané et inconscient - le ressenti - à une description qui peut fort bien ne pas correspondre à notre vécu.

Certains membres de l'équipe d'Evelyne sont en retard (les faits) elle ne sait pas comment s'exprimer car elle pense être sans charisme (croyance), ça la met en colère - ce qu'elle ne veut pas montrer - et sa communication devient inconsciemment agressive (comportement).

Les animaux qui communiquent constamment au ressenti en non-verbal vont prendre des postures "comme si" lorsqu'ils jouent.. ils ne se trompent jamais sur le message réel entre une posture de menace jouée ou une réelle posture de menace. Ils savent reconnaître le bon message. En comprimant la colère qu'Evelyne ressent par rapport à ce qu'elle croit de son manque de charisme, elle déforce son leadership.

Par contre pour Lancelot, Evelyne communiquait d'abord et avant tout par une succession de gestes et signaux très clairs pour lui et les paroles particulières sont vides de sens. C'est là toute l'efficacité de l'équi-coaching. Une fois levée la croyance limitante, cela a permis à Evelyne de faire l'expérience positive d'un changement d'attitude en direct.

mercredi 18 juillet 2012

Qui est le réel driver?

J'ai alors suivi une formation qui m'a fort interpellée. Cette formation mettait en présence l'animal et son propriétaire et, par le biais du test musculaire du Dr Goodheart, prétendait à améliorer le bien-être et la santé de l'animal. Etant persuadée que ma voie était désormais de m'occuper des animaux je m'apprêtais à me lancer dans cette direction quand je fus très surprise d'une constante dans les soins prodigués : au bout de deux à trois semaines l'efficacité s'estompait...
Il m'a fallu un bon moment pour réaliser que je travaillais une relation et que s'occuper d'un seul côté de cette relation était tout bonnement sans résultat stable. Pourquoi? Parce que ce qui avait amené l'animal a avoir tel ou tel symptôme provenait de l'écologie de son environnement et le replacer dans le même contexte aboutissait à effacer le mieux pour retrouver la chose connue. L'animal était donc porteur de ce que l'on appelle les "drivers" de son propriétaire au point d'avoir des réactions de stress et des comportements déviants.

Un driver est un message, une phrase qui tourne en boucle verbale ayant un effet inhibiteur.

Dans le milieu équestre j'ai ainsi rencontré des cavaliers propriétaires en possession d'étalons ingérables ou de pauvres haridelles "plein papier" qui avaient pour devoir d'accomplir ce que leurs propriétaires rêvaient d'atteindre. "Sois parfait mon bel étalon", "sois parfaite ma belle jument et donne moi un maximum de poulains", "sois fort mon cheval", "fais plaisir et donne-moi ce changement de pied", "dépêche-toi (de passer cette flaque, on va pas y passer la journée!)", "fais un effort (concentre-toi et bosse!)".
En entreprise nous allons retrouver ces mêmes drivers car chacun de nous a reçu des injonctions parentales ou scolaire que la société a repris et que nous entretenons jour après jour. Alors que ces messages seraient censés nous guider dans la "bonne" voie, ils agissent souvent à l'opposé. L'Analyse transactionnelle en a identifié 5 qui sont récurrents chez chacun d'entre nous.

On les appelle des messages contraignants. Ils vont entraîner des réactions de stress inadaptés aux situations en jeu. En équi-coaching ils apparaissent très vite quand l'accomplissement d'un exercice proposé reste sans réponse de la part du cheval. Si c'est inconfortable, la prise de conscience est immédiate ainsi que la mise en pratique rapide d'une conduite écologique pour le coaché, écologie qui mènera à l'efficacité.

Vous les avez lu plus haut ces messages contraignants qui hantent les couloirs des centres équestres, ils sont les mêmes en entreprises :

Sois fort :  cache tes émotions et tes faiblesses, sois un battant, un champion, ...
phrase fétiche : sans commentaires

Sois parfait : lisse, ordonné et irréprochable
phrase fétiche : il faut que... je dois...

Fais plaisir : accepte ce client que ta collègue refuse
phrase fétiche : c'est gentil, s'il vous plaît

Dépêche-toi : fais au plus vite au mieux, sois aux taquets, proactif...
phrase fétiche : abrégeons, dépêchons-nous

Fais un effort : applique-toi mieux sur ce dossier,...
phrase fétiche : j'essaie, c'est dur

Ceci étant chaque driver possède les qualités de ses défauts
Par exemple, le sois parfait est un bon organisateur,  le sois fort est résistant, tenace, le fais un effort est quelqu'un de fiable, le fais plaisir a un bon relationnel et est empathique, le dépêche-toi est efficace, etc... Prendre le temps d'écouter ces messages avec lesquels nous communiquons vraiment sera une belle ouverture.

Car pour lui-même le manager qui identifie ses propres messages contraignants évite de se saboter. S'il repère les drivers de ses collaborateurs il pourra également mieux communiquer avec eux. Le cheval met facilement en lumière nos messages contraignants et il le fait rapidement. Cette efficacité est transposable dans le quotidien professionnel au bénéfice de tous.

mardi 10 juillet 2012

Comment un leader peut-il améliorer ses compétences avec un cheval?

Etre responsable d'un poste est une chose, être responsable d'une équipe peut être déroutant car sans écoute de l'autre la communication sombre dans un sens unique peu épanouissant et la fonction se vide de sens. Etre responsable d'une équipe demande de se connaître et d'apprendre à connaître l'autre - les autres.
Dans la suite des articles précédents sur la façon dont l'équicoaching permet de comprendre que la communication est un échange et vous apprends ce qu'est la puissance d'une émotion,  j'avais un début de compréhension mutuelle dans la découverte de mon cheval.

Une première brèche avait signé un début de communication entre nous... et entraîné  des questions dans mon propre chef. J'avais "sauvé" ce cheval de conditions de vie peu agréables certes mais que - somme toute - 95% de la planète des chevaux de club partagent.

Comprendre maintenant qu'il pouvait demander quelque chose me compliquait singulièrement l'existence. C'était bien plus facile de garder l'option "fais ce que je te dis, le reste c'est moi qui gère!"... J'avais cependant l'impression de rentrer dans un monde totalement inexploré et riche. Et avec un acharnement forcené je me mis en tête d'essayer de le comprendre. Mes précédentes aventures équestres m'avaient toujours mise en position de supérieure hiérarchique bienveillante. Devenir propriétaire avait changé la donne à plusieurs égards dont le plus important : j'avais été le chercher et j'allais en être responsable pour un bon moment...

En entreprise, prendre le rôle du manager faisant fonction pour quelques heures, quelques jours ou quelques semaines, cela peut être plus facile que de tenir la posture de dirigeant à temps plein. A temps plein c'est un apprentissage! 
Je reviens à Fabienne déjà mentionnée dans l'article Hiérarchie et messages clairs assistés par les chevaux. Une croyance tenace qu'elle ne possédait en rien le savoir être d'un manager était particulièrement handicapant.

Quelle idée se faire du savoir faire et du savoir être un dirigeant?
Voyons comment cela s'est passé pour Fabienne.
Dans sa démarche de coaching et lors du séminaire dont je fais mention elle venait "acheter" une recette de leadership à l'extérieur. Pourtant lors de l'activité proposée avec le cheval, et à son plus grand étonnement elle fut la seule à emmener avec elle   le cheval qu'elle avait choisi dans un parcours qu'elle a fait deux fois en pleine euphorie de réussite! Cela devant des hommes dont on aurait attendu qu'ils fussent plus outillés qu'elle dans cette démarche.

Elle a réveillé en elle une compétence ignorée de leader - sans doute enterré depuis trop longtemps et qui était capable de faire bouger un cheval certes mais aussi une équipe. Ses demandes étaient justes, profondément équilibrées, ce qui a permis que le cheval adhère complètement à son projet. Elle a découvert par elle-même qu'être un leader c'était être à l'écoute des autres!

Un mois plus tard j'ai revu Fabienne et voici son témoignage :

"Cette place de leader je me refusais à la prendre. C'est une place où il faut s'occuper des autres à temps plein et je ne voyais pas du tout cet aspect-là dans ma fonction de manager. J'étais beaucoup plus préoccuppée à remettre un dossier impeccable que de m'ouvrir aux autres et écouter ce qu'ils avaient à me dire. J'avais peur de leur réaction et je partais au quart de tour quand je sentais une critique venir. Maintenant je me donne le temps d'arrêter un entretien quand j'ai besoin de réfléchir et je prends note des échanges. Cela me permet de me poser et de prendre des décisions en fonction. Dans mon agenda, je prend le temps de la rencontre individuelle chaque semaine pour une évaluation et une demande. Je mets un point d'honneur à les motiver. 
Quand je repense à ce cheval... c'était une expérience étonnante..."

Expérience qui lui a permis de vivre le savoir être de leader (et non le "savoir faire" qu'elle possédait déjà).

A ce même stage se trouvait un homme en questionnement qui venait chercher cette réponse - vitale pour lui à un tournant de sa carrière - "suis-je un leader?" ... la réponse a fusé rapidement : il préfère suivre au lieu de diriger. Ce constat lui a permis de poser des choix conscients et justes pour lui alors qu'il était parti pour suivre les conseils d'un entourage qui le poussait à lancer son entreprise. Certes répondre à des questionnaires peut aboutir à des résultats équivalents. Ceci étant, vivre dans le ressenti la réponse sans l'intellectualiser permet d'être sûr de son choix et fait toute la différence quant à la prise de conscience.
Tout comme il est impensable d'apprendre à nager dans un livre sans se jeter à l'eau, une expérience d'équi-coaching permet de transposer la prise de conscience du ressenti à l'environnement de travail. Et cela reste acquis des années plus tard.





jeudi 5 juillet 2012

La communication est relationnelle et cela s'apprend


Le lien est mouvant, riche et s'entretient
Ce fameux hennissement (mentionné précédemment dans Hiérarchie et messages claires assistés par les chevaux) je le croyais acquis! ... Pauvre de moi, j'ai du apprendre que cela devait se reconquérir chaque jour.
Et c'est pareil en entreprise. Le lien contractuel qui lie le collaborateur à son manager se gagne chaque jour!
L'instrument de notre communication qui avait allumé une flamme d'intérêt dans les yeux de Lancelot était un immense bâton duquel pendait une corde et qui symbolisait la prolongation du bras - me disait la grande blonde toute calme. A l'aide du grand bâton il fallait faire bouger les hanches du cheval d'un côté puis de l'autre, le faire reculer et enfin poser le bâton sur la maxillaire pour faire bouger l'avant. Ce bâton, elle l'appelait "bâton-carotte". Cela me plongeait dans des abîmes de réflexion, était-ce la couleur orange du plus bel effet qui aurait fait croire au cheval qu'une caresse dudit bâton équivalait à une caresse d'un kilo de carotte? Je ne sais pas. Toujours est-il qu'au bout de trois fois Lancelot avait compris ce qu'il fallait faire. La fois suivante il poussait des soupirs d'ennuis très profonds. Je ne pouvais que constater que la communication qui s'était ouverte entre nous s'éteignait déjà.

Car plus de la même chose génère le même résultat, une communication entre un manager et son collaborateur peut s'éteindre par des demandes répétées ad nauseam.

Et c'est bien ce qui m'est arrivé. Car dans l'idée d'une technique parfaite il fallait que je m'exerce même si Lancelot avait capté la demande à 100% ... derrière, devant, en arrière. Entre les mouvements Lancelot s'endormait. Ca me faisait rire mais j'étais la seule à trouver ça drôle. Le hennissement se faisait rare... je comprenais mal ce qui se passait. Il avait l'air de plus en plus éteint.
Pour être riche et saine une communication doit passer dans les deux sens
Un matin je le remis au box après avoir fait bouger pour la xième fois les trois morceaux de mon cheval. Et laissant par distraction la porte à glissière de son box ouverte je partis vers mon armoire ou les carottes - les vraies - se trouvaient... Et voilà que j'entends mon Lancelot  s'animer derrière moi, prêt à me suivre; je me retourne et n'ai d'autre moyen pour qu'il reste au box que de lui dire un grand "non". Il lève alors un antérieur et je suis stupéfaire de la clareté du geste : tout son corps dit "donne-moi une carotte". Cette forme de demande commune à bien des mammifères, un membre en avant, et que l'on interprétera selon son éducation ou sa culture de "donne-moi" à "s'il vous plaît" ... était absolument limpide. C'est une quête gestuelle bien claire que mon cheval connaissait aussi.
Des trois premiers "jeux" Parelli bien assommants pour lui mais qui avait ouvert une porte dans la communication je n'étais plus la seule à demander quelque chose! Lui aussi me demandait du mieux qu'il le pouvait quelque chose qu'il savait se trouver dans l'armoire. J'ignorais qu'un cheval pouvait communiquer, pouvait penser, pouvait s'exprimer... J'étais chavirée... un échange s'installait.

Une communication c'est un message qui passe dans les deux sens. 

Lancelot me donnait ses trois morceaux de corps que je faisais bouger et qui me contentait à ce stade. De son point de vue de cheval, il était juste qu'il attende de moi un retour. Et comme ce retour se faisait attendre, c'est lui qui en a pris l'intiative. C'est de lui qu'est venu la demande d'un échange.

"L’échange, c’est un temps que le manager consacre à son collaborateur, pour l’écouter ou lui donner un feedback sur son travail.
Est-ce une marque de reconnaissance ? Pour y réfléchir, demandez-vous si vous donnez ce temps et ces feedbacks à des collaborateurs que vous estimez de faible valeur. Si non, il est naturel que vos collaborateurs traduisent votre attention comme une marque de reconnaissance (il me donne un feedback ou il échange avec moi, donc je vaux quelque chose à ses yeux)."
Extrait de l'artice de Karine Aubry sur la Reconnaissance au travail